Tunisie: les enquêteurs sur la dictature réclament l'accès aux archives policières

11 juin 2015 à 11h57 par La rédaction

RADIO ORIENT
L'instance chargée de recenser les crimes commis sous les dictatures en Tunisie s'est plainte mardi de ne pas avoir accès aux archives de la police où se trouvent des éléments-clés pour rendre justice aux victimes des régimes autoritaires. "A l'Instance Vérité et Dignité (IVD), nous ne pouvons réparer les injustices faites aux gens tant que nous n'aurons pas accès aux archives de la police politique", a dénoncé, au micro de la radio Mosaïque-FM, la présidence de l'Instance, Sihem Bensedrine. Mme Bensedrine a indiqué vouloir "aboutir à travers le dialogue" à un accord avec le ministère de l'Intérieur, comme cela a été le cas pour les archives de la présidence tunisienne. "Nous avons un accord avec la présidence de la République, nous y avons un accès total aux archives de la dictature (...) le problème concerne les archives de la police politique", a-t-elle souligné. La police tunisienne était au coeur du système répressif du président déchu en 2011, Zine El Abidine Ben Ali. Ce dernier avait organisé une répression sans merci de ses opposants, en particulier les islamistes du parti Ennahda, devenu aujourd'hui la deuxième force au Parlement tunisien. La torture et les mauvais traitements étaient notamment monnaie courante dans les geôles du ministère de l'Intérieur. Plus de quatre ans après la révolution de janvier 2011, aucune réforme d'ampleur de l'appareil policier tunisien n'a été organisée. L'IVD, créée par une loi en votée fin 2013, a pour mission, en cinq ans maximum, de "dévoiler la vérité sur les violations des droits de l'Homme commises entre le 1er juillet 1955 et le 31 décembre 2013", soit sous le premier président tunisien, Habib Bourguiba, son successeur M. Ben Ali, mais aussi sous certains des gouvernements en place après le soulèvement de 2011. Elle a annoncé fin mai avoir reçu quelque 12.700 dossiers de plaignants qui ont commencé à être auditionnés. L'IVD doit identifier les responsables des violations et faire en sorte qu'ils rendent des comptes, ainsi que réhabiliter les victimes et leur octroyer réparation. La loi a doté l'instance de très larges pouvoirs, notamment un accès total aux archives publiques. Son champ de compétence concerne "toute agression caractérisée ou méthodique perpétrée à l'encontre de l'un des droits de l'Homme par les organismes de l'Etat, par des groupes ou par des individus agissant en son nom ou sous sa protection". Les crimes les plus graves dont elle peut être saisie sont notamment l'homicide volontaire, le viol, les exécutions extrajudiciaires et la torture. AFP