Tunis ferme sa frontière avec la Libye après l'attentat suicide revendiqué par l'EI

26 novembre 2015 à 15h37 par La rédaction

RADIO ORIENT
La Tunisie a annoncé mercredi soir la fermeture provisoire de sa frontière avec la Libye, pays en proie au chaos, au lendemain de l'attaque suicide en plein coeur de Tunis contre la sécurité présidentielle, revendiquée par le groupe Etat islamique (EI). Cet attentat, qui a fait au moins 12 morts, est le troisième d'envergure revendiqué par le groupe extrémiste cette année après ceux du musée du Bardo en mars et de Sousse en juin (60 morts). Après avoir rétabli dès mardi soir l'état d'urgence dans tout le pays et imposé un couvre-feu nocturne dans le Grand Tunis, les autorités tunisiennes ont annoncé une série de mesures, dont la fermeture de la frontière avec la Libye. Le Conseil de la sécurité nationale, présidé par le chef de l'Etat Béji Caïd Essebsi, a décidé "la fermeture de la frontière avec la Libye pendant 15 jours à partir de minuit ce jour (mercredi), avec renforcement de la surveillance sur les frontières maritimes et dans les aéroports", selon un communiqué de la présidence. Il a également été décidé d'"intensifier les opérations de blocage des sites (internet) en lien avec le terrorisme" et de "prendre des mesures urgentes concernant les personnes revenant des foyers de conflit dans le cadre de la loi antiterroriste", sans préciser lesquelles. Ce Conseil a aussi annoncé le recrutement de 3.000 agents supplémentaires au ministère de l'Intérieur et 3.000 autres dans l'armée en 2016. Tunis souligne depuis de longs mois pâtir du chaos en Libye voisine, où le conflit entre factions rivales a permis l'émergence du groupe EI, et a entrepris cet été la construction d'un mur frontalier de 200 kilomètres. Des milliers de Tunisiens se trouvent, selon les autorités, en Irak, en Syrie et en Libye dans les rangs de groupes extrémistes. D'après elles, les auteurs des attaques sanglantes du Bardo et de Sousse avaient été formés au maniement des armes dans ce dernier pays. Mercredi, le ministère de l'Intérieur a en outre précisé que l'explosif utilisé la veille était du "Semtex, un produit déjà retrouvé dans des ceintures explosives saisies en 2014 après avoir été "apportées illégalement de Libye". - 'Très grave' - Survenu à proximité d'une des principales artères de Tunis, non loin du ministère de l'Intérieur, l'attentat contre un bus de la sécurité présidentielle a été revendiqué par l'EI dans un communiqué diffusé sur des sites jihadistes. Son auteur, un Tunisien identifié comme "Abou Abdallah al-Tounissi", muni d'une ceinture d'explosifs, s'est introduit dans le véhicule et "s'est fait exploser", selon le texte. Le Premier ministre Habib Essid a reconnu que cet attentat constituait un nouveau coup dur. Au Bardo et à Sousse, "le but était de troubler le processus démocratique, (...) le secteur du tourisme", a-t-il déclaré. Celui de mardi "est d'un autre genre" car "il a visé un des symboles de l'Etat. (...) C'est grave, très grave". Sous le choc, la presse a appelé à la résistance, ainsi qu'à "une nouvelle philosophie" pour lutter "contre le terrorisme". Une cérémonie d'hommage national a été organisée au palais présidentiel. Parmi les centaines de personnes présentes, dont les familles, beaucoup étaient en pleurs devant les 12 cercueils recouverts du drapeau tunisien et accompagnés des portraits des défunts. "La Tunisie vaincra le terrorisme", a assuré Béji Caïd Essebsi. De nombreux pays ont apporté leur soutien. "Les terroristes cherchent à utiliser la peur et la violence pour saper les avancées importantes que les Tunisiens ont réalisées", a réagi la Maison Blanche. Le président français François Hollande a adressé "personnellement" un message de soutien à M. Essebsi, lors d'un entretien téléphonique mercredi. - Festival maintenu - La Tunisie, décrite comme un modèle pour sa transition démocratique, est devenue une cible privilégiée des jihadistes depuis sa révolution en janvier 2011. Les autorités annoncent régulièrement des arrestations de jihadistes présumés, et dans la nuit de mardi à mercredi, 18 personnes suspectées d'appartenir à des "organisations terroristes" ont encore été interpellées. Deux syndicats des forces de sécurité ont, eux, fait porter la responsabilité des morts de mardi "au gouvernement et aux différents politiques en raison de leurs décisions improvisées et des nominations aléatoires". Sur les lieux de l'attentat, un agent a regretté mardi soir que les autorités n'aient pas changé le lieu de la relève de la garde alors que "nous sommes les premiers à être ciblés". Le site, bouclé, a vu défiler mercredi des centaines de Tunisiens venus apporter leur soutien aux forces de l'ordre et déposer des bouquets de fleurs sur les barricades. De nombreux jeunes ont aussi exprimé leur rejet du terrorisme, en assistant aux projections des Journées cinématographiques de Carthage (JCC), un événement maintenu en réponse à "ces actes barbares", selon sa direction.