La connexion djihadiste tuniso-libyenne, lâ??hydre qui menace la Tunisie

20 août 2015 à 16h34 par La rédaction

RADIO ORIENT

Il est un fait incontestable, la Tunisie se trouve dans une position extrêmement vulnérable au vu de ce qui se passe en Libye, pays voisin, en plein troubles, avec lequel nous partageons une frontière qui s'étend sur près de 459 kilomètres. Ce que nous partageons aussi avec la Libye est la connexion entre les mouvements djihadistes. Et avec l'ascension de la nébuleuse « Daech » à nos portes, la menace se précise de jour en jour...

 

Les relations entre les djihadistes tunisiens et libyens remontent à des décennies et ces connexions méritent la plus grande vigilance et attention, puisque cette situation pourrait bien conduire à de nouvelles attaques de Daech sur le sol tunisien. C'est ce qu'affirme un rapport publié récemment par le Washington Institute for Near East policy, tirant la sonnette d'alarme sur ce qui pourrait advenir de la Tunisie si jamais la menace n'est pas prise avec tout le sérieux qui se doit.

 

Ce n'est pas donc une surprise si l'auteur de l'attentat terroriste de Sousse, Seifeddine Rezgui s'est formé au maniement des armes dans un camp d'entraînement libyen, ou qu'il se trouvait en Libye en même temps que les deux assaillants de l'attaque contre le musée du Bardo. Ces opérations représentent la suite logique des relations, remontant aux années 1980, qui lient les djihadistes tunisiens et libyens, et qui se sont intensifiées, il est vrai, depuis 2011. D'après le rapport, ces attaques sont un rappel brutal de ces liens, amenés à s'amplifier si Daech choisit de cibler directement la Tunisie.

 

Un bref rappel historique fait état de l'existence de réseaux djihadistes depuis les années 1980 ou des Tunisiens et des Libyens ont étroitement collaboré en Afghanistan. On apprend que le chef de l'organisation « l'Union islamique » en Afghanistan, avec d'autres chefs libyens, avaient entrepris d'aider les Tunisiens à créer leur propre camp djihadiste. Ce projet ne serait venu à maturation que bien des années après, lorsque les futurs chefs d'Ansar Chariâa ont collaboré ensemble. L'un d'eux se prénomme Seifallah Ben Hassine, alias Abou Iyadh.

 

Après le 11/9, les Tunisiens et les Libyens ont travaillé ensemble sous la bannière de Katibat Al Fath Al Moubin près des frontières tunisiennes. L'étude souligne, qu'à bien des égards, cette formation a été un précurseur à l'actuelle Katibat Okba Ibn Nafaâ, basée dans les montagnes de Châambi...

 

Vers la même époque, c'est-à-dire la première décennie des années 2000, les réseaux du Groupe Islamique combattant en Libye, fournissaient un appui logistique et facilitaient l'infiltration des djihadistes Tunisiens vers l'Irak, pour combattre dans les rangs d'Al-Qaida. C'est ainsi que de nombreuses connexions se sont installées. Connexions qui ont été importantes après 2011, quand les djihadistes d'Irak ont rejoint Ansar Chariâa en Tunisie et en Libye et plus récemment Daech...

 

Au cours des quatre dernières années, les activités des réseaux terroristes dans la région se sont intensifiées, notamment après les soulèvements en Tunisie et en Libye. Une Libye qui est devenue le refuge des djihadistes étrangers. Le Washington Institute précise qu'AQMI a continué à jouer son rôle, en particulier avec la contrebande d'armes à partir de la Libye vers la Tunisie. Plusieurs de ses membres ont été arrêtés soit sur le sol tunisien ou libyen pour des affaires liées à la contrebande ou à la planification d'attaques terroristes.

 

Outre les nombreuses arrestations, dont beaucoup n'ont pas été rendues publiques, les relations entre les combattants tunisiens et libyens se sont renforcées, à travers les deux organisations présentes dans les deux pays, Ansar Chariâa. Les signes, attestant que des Tunisiens se rendaient en Libye pour s'entrainer dans les camps djihadistes, ont été constatés depuis le printemps de 2012. Le rapport estime que le kamikaze ayant échoué en 2013 à faire exploser un hôtel à Sousse, s'était vraisemblablement formé dans un camp libyen.

 

Par ailleurs, en Libye, les différentes attaques commises contre les sièges de la diplomatie tunisienne, en l'occurrence l'ambassade et le consulat, étaient liées à Ansar Chariâa en Libye. Le Tunisien Ali Harzi, abattu dans un raid aérien américain le 15 Juin à Mossoul, était l'un des instigateurs de l'attaque de 2012 contre le consulat US à Benghazi et est impliqué dans le meurtre de l'ambassadeur américain. D'autre part, suite à la classification d'Ansar Chariâa en Tunisie en tant qu'organisation terroriste, par le gouvernement tunisien en 2013, ses membres qui n'ont pas été arrêtés,ont rejoint le djihad en Syrie ou Katibat Okba Ibn Nafaâ à Châambi, ou ont fui vers la Libye, dont leur chef Abou Iyadh.

 

Au-delà des réseaux d'Ansar Chariâa, depuis l'automne 2014, les activités djihadistes des Tunisiens se sont accrues en Libye au sein de Daech. Le gouvernement tunisien estime que jusqu'à 1000 de nos compatriotes, combattent actuellement en Libye ou y suivent un entrainement. Les attaques les plus sanglantes connues par la Tunisie, ont été commises par des jeunes partis se former aux camps de l'organisation terroriste. Les auteurs des attentats du Bardo et de Sousse avaient réussi à passer par tous les filets sécuritaires, sortant et entrant en Tunisie sans être inquiétés outre mesure.

 

Le rapport, se basant sur ces éléments, et sur la difficulté pour l'Etat tunisien de contrôler ou sécuriser les frontières, durant les quatre dernières années, met en garde sur la forte probabilité, que des attaques terroristes soient perpétrées sur le sol tunisien, en provenance directe ou en lien avec la Libye. Le fait est que cette menace ne vient pas de nulle part, découlant d'une histoire qui remonte à des décennies et qui représente un problème trop souvent ignoré ou pris à la légère par les autorités tunisiennes, avant et après la révolution de 2011.

 

Pour endiguer ce flux de djihadistes et la menace venue de Libye, le gouvernement tunisien a entrepris de construire un mur séparateur longeant la frontière tuniso-libyenne. Mais ce dispositif sera-t-il efficace si on prenait en compte les réseaux bien rodés impliquant contrebandiers et terroristes ? Cela reste à prouver.

 

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