Déchéance de nationalité, état d'urgence: la réforme constitutionnelle détaillée

27 janvier 2016 à 17h41 par La rédaction

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Voici les principaux points de l'intervention de Manuel Valls devant la Commission des lois sur les deux articles de la révision constitutionnelle, mercredi à l'Assemblée: - CONSTITUTIONNALISATION DE L'ETAT D'URGENCE (article 1): le Premier ministre a rappelé les "trois motifs" qui justifient l'inscription dans la loi fondamentale du régime de l'état d'urgence. Ce régime, le plus utilisé des "régimes de circonstances exceptionnelles" pendant la Ve République, est aussi le "seul qui ne soit pas inscrit dans la norme juridique la plus haute", ce qui "pose un vrai problème au regard de la hiérarchie des normes", selon M. Valls. L'inscrire permettra de "consolider les mesures de polices administratives définies par la loi de 1955", a-t-il expliqué. En outre, il convient de "parachever la loi de 1955", certaines mesures n'ayant "pu être inscrites dans la loi du 20 novembre (qui l'a modifiée, NDLR) en raison de contraintes jurisprudentielles". Manuel Valls a annoncé un projet de loi en ce sens. Enfin "inscrire l'état d'urgence dans la Constitution" permettra "d'empêcher sa banalisation ou tout recours excessif", en encadrant ses "principes essentiels": motifs de déclenchement, fait de confier au Parlement la prérogative de le proroger au-delà de 12 jours. M. Valls a souligné que le gouvernement était "très ouvert" à des amendements proposant d'inscrire dans la Constitution "l'existence et la nature (du) contrôle parlementaire" s'exerçant sur l'état d'urgence. Il s'est en revanche montré plus réservé sur la proposition d'inscription dans la loi fondamentale d'un "plafond temporel, par exemple de quatre mois". - PAS D'ETAT D'URGENCE PERMANENT: Souhaitant sans doute clarifier ses déclarations ambigües la semaine dernière à la BBC, le Premier ministre a souligné que "le régime d'état d'urgence (était) un régime d'exception, nécessairement borné dans le temps". Manuel Valls a communiqué au passage un nouveau bilan des mesures mises en oeuvre dans le cadre de l'état d'urgence: 3.234 mesures de perquisitions administratives ont été décidées et les assignations à résidence ont concerné 406 personnes. - DECHEANCE DE NATIONALITE (article 2): Le premier ministre a annoncé que la loi de révision constitutionnelle ne ferait pas "référence à la binationalité", ni "a priori" la loi ordinaire. Cette évolution par rapport au texte initial est une concession aux très nombreux responsables politiques, surtout à gauche, qui redoutaient une "stigmatisation" des binationaux. Pour ne pas créer d'apatrides, la France s'engagera "dans la ratification" de la Convention des Nations unies de 1954 qui l'interdit, a-t-il précisé. La loi d'application de l'article 2 prévoira en conséquence "un régime global couvrant à la fois la déchéance de nationalité et la déchéance de tout ou partie des droits attachés à la nationalité actuellement prévus par le code pénal", a-t-il poursuivi. "Un terroriste se verra concerné soit par la déchéance de nationalité (s'il est binational, NDLR), soit par la déchéance des droits attachés à la nationalité (éligibilité, emploi dans la fonction publique, droit de vote...) s'il n'a que la nationalité française, pour ne pas créer d'apatride", a expliqué Matignon à l'AFP. Le Premier ministre a en outre annoncé que la déchéance de nationalité pourrait concerner les crimes, mais "sans doute aussi les délits les plus graves" (association de malfaiteurs à caractère terroriste, financement direct du terrorisme ou entreprise terroriste individuelle, par exemple) - un pas en direction de la droite et de l'extrême droite qui le réclamaient. Le champ sera "strictement limité au terrorisme et aux formes graves d'atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation", a-t-il précisé. Le Premier ministre a ainsi formulé la nouvelle version de l'article 2: "la loi fixe les conditions dans lesquelles une personne peut être déchue de la nationalité française ou des droits attachés à celle-ci lorsqu'elle est condamnée pour un crime ou un délit constituant une atteinte grave à la Nation". Reste un point à trancher, celui de savoir si la déchéance sera une "décision administrative" ou une "peine complémentaire prononcée par le juge pénal", a souligné M. Valls. AFP