Décès d'Ahmed Chalabi, artisan de l'invasion américaine de l'Irak

3 novembre 2015 à 16h19 par La rédaction

RADIO ORIENT
L'homme politique irakien Ahmed Chalabi, décédé mardi à Bagdad, a joué un rôle clé pour convaincre les Etats-Unis d'envahir son pays en 2003 en fournissant de fausses informations sur les supposées armes de destruction massive. Ce personnage controversé est "décédé d'une crise cardiaque" à l'âge de 71 ans, a indiqué le Parlement à Bagdad. Chalabi avait occupé une place de premier plan avant et pendant la guerre déclenchée par le président George W. Bush pour renverser Saddam Hussein. Mais ce chiite laïc a ensuite rapidement perdu de son influence dans la construction chaotique du nouvel Irak, même s'il y a occupé des postes politiques importants. Né en 1944 dans une famille aisée de Bagdad, Ahmed Chalabi fuit avec sa famille la révolution de 1958 qui renverse la monarchie et dépose le roi Fayçal II. Dès lors, ce professeur de mathématiques, diplômé de l'université de Chicago et du Massachusetts Institute of Technology, vivra plus aux Etats-Unis et à Londres qu'en Irak. En 1992, il fédère en exil plusieurs mouvements des différentes communautés irakiennes, principalement arabes chiites et sunnites, ainsi que des Kurdes, au sein du Congrès national irakien (CNI). - D'allié à paria - Un an plus tard, il s'installe dans le Kurdistan irakien, qui jouit alors d'une autonomie de fait et, soutenu par les services secrets américains, y organise deux ans plus tard une offensive contre Saddam Hussein. L'opération est un échec et la CIA le lâche. Il retourne aux Etats-Unis. Malgré un lourd passé judiciaire avec des condamnations pour corruption et détournement de fonds, notamment en Jordanie, M. Chalabi parvient à tisser des relations rapprochées avec les faucons du Pentagone et le vice-président Dick Cheney. Ces derniers voient en lui l'une des principales figures de l'opposition en exil. Il leur fournit alors de nombreuses informations, en particulier sur la possession de supposées armes de destruction massive par le régime, qui serviront à justifier l'entrée en guerre. Plusieurs personnalités de l'administration du président George W. Bush espèrent alors que M. Chalabi et le CNI prennent le pouvoir en tant que gouvernement transitoire après la chute de Saddam Hussein. Mais son parti, resté trop longtemps à l'étranger, souffre d'une mauvaise image et Chalabi devient un paria, visé dès 2004 par un mandat d'arrêt pour fraude, et accusé de fournir des informations à l'Iran. A Bagdad, Chalabi a notamment occupé les postes de vice-Premier ministre entre avril 2005 et mai 2006, et le portefeuille stratégique du pétrole. Il est ensuite devenu un membre du Parlement, où il a occupé la présidence de la commission des Finances jusqu'à son décès. Après l'invasion américaine, M. Chalabi avait été l'un des principaux partisans de la "débaasification", l'éviction de la scène publique des soutiens de Saddam Hussein, qui nourrissaient la révolte contre l'occupation menée par les Etats-Unis. Les politiques successives ont peu à peu déçu les populations sunnites et contribué à jeter les bases du groupe jihadiste Etat islamique (EI), qui a conquis en 2014 d'importants pans du territoire irakien. AFP