Les Druzes: histoire, croyances et survie d'une communauté  singulière du Moyen Orient

Modifié : 17 juillet 2025 à 13h18 par Radio Orient

Les Druzes, ou Mouwahidoun (selon l’appellation officielle), constituent une petite communauté religieuse ésotérique comptant un peu plus d’un million d’adeptes répartis entre le Liban, la Syrie, la Jordanie et Israël. Leur madhab, ou école de pensée, est né au XIᵉ siècle au Caire, durant le califat fatimide. Issu de l’islam ismaélien, il a développé une doctrine spirituelle propre, intégrant des concepts issus des philosophies grecque et orientale.

Les Druzes: histoire, croyances et survie d'une communauté  singulière du Moyen Orient

Les Druzes accordent une grande importance à la communauté et sont profondément attachés à leur terre ainsi qu’à leurs traditions.

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Les Mouwahidoun croient en l’unicité absolue de Dieu et adhèrent à un monothéisme strict. Ils professent également la foi en l’immortalité de l’âme ainsi qu’en sa réincarnation. Cette communauté ne pratique aucun prosélytisme : elle ne cherche pas à convertir et n’accepte pas de nouveaux membres. On naît druze, on ne le devient pas. Pourtant, même les Druzes de naissance ne reçoivent pas automatiquement une instruction religieuse approfondie. L’accès à la dimension ésotérique de leur foi nécessite une démarche volontaire : l’individu doit exprimer lui-même le souhait d’être « initié », puis être jugé apte et digne de recevoir et de comprendre la sagesse divine. Les textes sacrés druzes sont regroupés dans un corpus intitulé Les Épîtres de la Sagesse (Kitab al-Hikmah), dont l’accès est réservé aux seuls initiés.

Une foi secrète, une communauté fermée 

De ce fait, la communauté druze se divise en deux catégories : les initiés (ʿOqqal), une élite religieuse ayant accès aux textes sacrés et aux enseignements ésotériques, et les non-initiés (Juhhal, un terme arabe signifiant également « ignorants » ou « non instruits »), qui doivent se conformer aux principes moraux et sociaux de la communauté sans connaître en détail les préceptes de la foi. Les non-initiés constituent la majorité. Les initiés se distinguent par leur tenue vestimentaire : les hommes portent une calotte ou un turban ainsi qu’un pantalon bouffant (cherwal), tandis que les femmes revêtent une longue robe noire et un voile blanc léger couvrant la tête, parfois même une partie du visage.

Tous les Druzes sont tenus de vivre selon des valeurs fondamentales telles que la loyauté envers la communauté, le respect des femmes et des personnes âgées. Principalement montagnards et réputés pour leurs qualités de combattants, ils sont connus pour leur attachement profond à leur terre ainsi que pour leur volonté résolue de défendre à la fois leur territoire et leur honneur.

Les Druzes opèrent une distinction claire entre la religion et la politique. Ce sont les leaders politiques qui représentent la communauté dans les pays où elle est présente. Toutefois, l’avis, l’arbitrage et souvent l’approbation des chefs religieux demeurent indispensables lorsque des décisions majeures, voire existentielles, doivent être prises.

Les Druzes s’opposent à l’islam conservateur, ce qui les expose à l’hostilité des intégristes musulmans, qui les accusent d’être des kouffar (infidèles). Une accusation que les Druzes rejettent fermement, sans pour autant échapper entièrement aux attaques verbales, voire physiques, des extrémistes.
Au XIᵉ siècle, craignant les persécutions, notamment en Égypte, ils se replièrent principalement dans les régions montagneuses du Croissant fertile. Ce territoire fut plus tard morcelé par les puissances coloniales franco-britanniques en quatre entités nationales : le Liban, la Syrie, la Jordanie et la Palestine. Bien que séparés par des frontières étatiques, les Druzes ont su préserver des liens solides entre les différentes communautés.

Druzes d’Israël et de Syrie : des trajectoires opposées

L’histoire des Druzes d’Israël se distingue par sa singularité. En 1948, la majorité des villages druzes choisissent de ne pas prendre part aux combats contre les forces juives. Ils demeurent dans leurs localités et concluent des accords avec l’État hébreu. En contrepartie, ils obtiennent la citoyenneté, le droit de vote, une représentation à la Knesset, ainsi que l’accès à des postes dans l’administration. De plus, les hommes druzes servent dans l’armée Israélienne. Toutefois, cette intégration n’est pas exempte de tensions, exacerbées ces dernières années par la montée en puissance d’un gouvernement israélien d’extrême droite.

Ailleurs, et notamment en Syrie, les Druzes se sont illustrés par un fort engagement nationaliste, en particulier sous l’Empire ottoman et durant la période coloniale. Sultan Bacha al-Atrache, figure emblématique originaire de Jabal al-Druze, s’est opposé aux Ottomans avant de mener l’insurrection contre les autorités françaises entre 1925 et 1927. Il demeure une figure centrale de la lutte pour l’indépendance syrienne acquise en 1945.

Les évènements en Syrie de juillet 2025 ou nombre de druzes furent tués et certains chefs religieux humiliés en public par des jeunes extrémistes visiblement des djihadistes, ravive le sentiment communautaire et la volonté des druzes de se défendre contre ce qu’ils perçoivent désormais comme un danger existentiel.